MONTCHEVRIER: un charmant petit village en Marche-Berrichonne

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Lettre Lasnier: 11 avril 1793

J’ai reçu, ma chère, avec bien de satisfaction, votre lettre du 20 février. Elle me persuade de plus en plus que vous cherchez vos consolations dans le sein de Dieu, seule et abondante ressource dans nos tribulations, et j’espère que vous les y trouverez, et pour ce monde et pour l’autre. Je voudrais être en même de vous donner de vive voix celles dont je serais capable, mais tel est le malheur de temps, que je ne puis même vous écrire souvent par la crainte de vous compromettre. Bornons nous à élever vers Dieu nos prières, il nous enverra du ciel la paix et la consolation que nous désirons avec tant d’ardeur. Souffrons avec patience et résignation, notre constance et nos croix ne seront pas sans mérite devant lui. J’embrasse tous vos enfants, je les prie de s’appliquer à vous obéir, à sentir leur malheur et à le réparer par la sagesse et la vertu.

Enfin j’ai la consolation d’être réuni avec mon neveu. Nous demeurons ensemble et dans la même pension. Je lui sais gré d’avoir quitté l’endroit ou il était, à quelques lieues de moi, pour venir me joindre. Nous ne nous séparons plus. Il me charge de vous [le] dire ici de sa part autant que de la mienne.

Je n’ai pas reçu de nouvelles de mon frère depuis longtemps. J’ai écrit il y a un mois à ma nièce qui m’avait écrit le 14 février, lorsque votre fils y était. Comme les moindres choses font ombrage dans l’état actuel des choses, je m’astiendrai d’écrire à qui que se soit, malgré l’innocence de mes lettres et la pureté de mes intentions, et de celles que je connais à ceux à qui je pourrais écrire. Je vous prie de leur faire savoir de mes nouvelles le plutôt qu’il vous sera possible, par La Souterraine, ou même en leur envoyant ma présente lettre, sous enveloppe, si vous ne pouvez pas écrire commodément. J’ai aussi reçu une lettre de ma paroisse datée du 23 février. C’est la dernière que j’ai reçu du pays. Je n’y ferai pas de réponse, ayant appris qu’on avait décacheté et refusé de remettre, à Argenton, une lettre que mon confrère écrivait à sa mère, et qui ne contenait cependant que des choses indifférentes, naturelles et  circonspectes ; mais on ne sait à qui, ni comment s’y prendre pour nous faire avaler le calice jusqu’à la lie. Faites donc savoir à ma sœur ou à mon frère mon état de bonne santé, et qu’ils le fassent savoir aussi à mes amis qui s’intéressent à moi.

Aucune de mes lettres ne s’est encore perdue jusqu’à la dernière écrite à ma nièce le 9 mars. J’ai aussi reçu toutes celles qui m’ont été écrites, à moins qu’il n’y en ait actuellement quelqu’une en route. Elles ne risquent rien quand une fois elles sont parties des bureaux de poste, ou l’on est tenté de les ouvrir quand on connaît les écritures. Vous me ferez plaisir de m’écrire souvent. Affranchissez vos lettres comme vous l’avez très bien fait de votre première. Il n’est pas nécessaire que nous signions. Mandez moi ce qui vous intéresse, ce qui intéresse votre famille. J’étais dans des inquiétudes ardentes, et vous pouvez mieux m’en tirer que personne. Ils sont éloignés des postes, et vos lettres peuvent partir deux heures après que vous les aurez écrites.

Tous mes amis se portent à merveille et me chargent de vous dire des choses honnêtes, et comme ils n’écriront pas chez eux de sitôt, vous leur ferez plaisir de faire savoir de leurs nouvelles en faisant savoir des miennes à mon frère.

Je ne puis vous exprimer toute l’étendue des sentiments d’amitiés et d’attachement avec lesquels je suis, ma chère, de tout mon cœur.

Mon neveu a reçu une lettre de son frère datée du 15 mars ; il lui a écrit le 29, et mandé sa réunion avec moi. Il jouit d’une santé excellente, ainsi que moi. Il a, ainsi que moi, quelque chose pour le soustraire à la misère pendant quelque temps (1)

 

(1) Adresse : A la citoyenne Françoise Lasnier, veuve Goumet, marchande, faubourg La Gasne. Par Lyon et Moulins, à Guéret, département de la Creuse.

 Sources: extrait du livre de l'Abbé Leclerc "Martyrs et confesseurs de la foi du diocèse de Limoges pendant la révolution française"  Editeur V. H.  Ducourtieux,  Limoges



21/06/2011

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