MONTCHEVRIER: un charmant petit village en Marche-Berrichonne

MONTCHEVRIER: un charmant petit village en Marche-Berrichonne

L'hiver rigoureux de 1789

    Ce texte, rédigé le 22 juin 1790 par un prêtre d’une paroisse du Berry (1), Montchevrier, souligne l’intérêt porté par cet homme d’église pour la période difficile mais aussi remplie de promesses et dans laquelle il a vécu….
Dans le langage de son temps, il témoigne :Cette année 1789 est mémorable pour l'hiver rigoureux qui l'a commencé et les suites célèbres qui en ont résulté.Il a commencé à geler fermement depuis le dimanche d'après la St MARTIN 1788; le 25 novembre jour de Ste CATHERINE, j'étais à Cluis (2) et la glace portait mon cheval dans tous les chemins ainsi qu'aux bords des ruisseaux  et depuis ce jour là jusqu'au 4 décembre il a fait un temps clair et des plus froids..
 Le 6 le froid a un peu lâché pendant le jour, le soir il a tombé un verglas qui a eu de fâcheuses conséquences: la nuit il a tombé beaucoup de neige et en gelant toujours de plus en plus jusqu'au 14. Ce jour 14 a fait espérer un adoucissement mais la nuit a encore été la plus froide de toutes les précédentes et cependant la moindre de toutes les suivantes jusqu'au 18 janvier.
 Le mardi 16 décembre il avait tombé pendant la nuit un verglas très froid qui fit que pendant le jour il était impossible de marcher au dehors sans faire beaucoup de chutes: la neige était si gelée qu'elle portait communément partout, quoiqu'elle fût de plus d'un pied et demi (3) de couche communément les moulins ne pouvaient moudre qu'avec beaucoup de difficultés, tant à cause de la gelée extrême, qu'a cause de la disette d'eau qui provenait de la grande sécheresse de l'automne, et on a été sur le point d'éprouver famine par cet inconvénient.l n'y eut pas vingt maisons de cette paroisse qui purent cuire la veille des fêtes de Noël, faute de farine, et plus de cinquante maisons particulières ont été obligées de vivre pendant les fêtes, que d'avoine pilée. Les moulins de la CREUSE (4) allaient tout doucement à force de bras pour casser continuellement la glace on y jetant souvent de l'eau chaude ; plusieurs moulins ont été brisés par ces difficultés à moudre; on s'est servi à BOURGES (5) de moulins à bras et dans bien des endroits de moulins a moudre le tabac.Il n'a point paru de soleil pendant tout cet intervalle, et on croyait par cette raison que les arbres ne gèleraient point comme ils gelèrent dans l'hiver rigoureux de 1709, mais on s'est trompé on a reconnu au commencement de Mai lentement qu'il avait gelé un cinquième au moins des châtaigniers et surtout les châtaigniers de 20 à 40 ans.Les petits et les vieux n'ont pas eu grand mal et même quelques-uns qui avaient paru morts par la gelée et très peu de l'année 1789 ont repoussé au mois de mai 1790. Il n'y a eu que très peu et de très mauvaises châtaignes en automne 1789, tant les arbres avaient souffert.
Enfin les thermomètres ont descendu trois degrés au-dessous de l'année 1709 et 1766. Il avait gelé communément de 30 à 32 pouces (6) sur la rivière de Creuse et à la fin Janvier lorsque le dégèle est venu sans chutes d'eau heureusement , les pièces de glace qui étaient sur les rivières charroyaient avec elles des pierres grosses comme des demi-fûts. La fonte des neiges ayant occasionné des débordements, ces pierres sont restées dans  bien des endroits au milieu des prés qui avoisinent les rivières.
Le verglas du 4 décembre a beaucoup endommagé les blés en sorte que la récolte a été mauvaise et ayant été précédée par une mauvaise aussi de 1788.
Le blé s'est vendu presque constamment pendant le cours des deux années 3 livres le boisseau (7), mesure d'AIGURANDE (8) . Il s'est même vendu des 3,18 livres a quelques marchés du mois de juin 1790.
e ne parle point des misères qui ont rendu ces années désastreuses pendant la tenue des États Généraux:
 l'Histoire l'apprendra mieux par la suite qu'on ne pourrait présenter le tracer.
 
22 juin 1790 -  Lasnier, curé de Montchevrier  (Extrait des registres paroissiaux de Montchevrier)
 
1)    Le Berry : duché au cœur de la généralité de Bourges. Pays essentiellement agricole ou le clergé détient environ 15% des terres. Les manufactures n’y jouent qu’un rôle secondaire.
2)    Cluis : paroisse voisine à une dizaine de kilomètres de Montchevrier
3)    Pied : unité de mesure de longueur :
Un pied (32,4 cm) = 12 pouces (un pouce = 2,7 cm) donc un pied et demi = 48,6 cm
4)    La Creuse : cours d’eau du Limousin et du Berry, affluent de la Vienne
5)    Bourges : ville principale du Berry. Chef lieu d’une généralité ; environ 20000 habitants en 1789. Bourges se localise à une centaine de kilomètres de Montchevrier.
6)    Pouce : un pouce = 2,706 cm donc 30 pouces = 81,1 cm
7)    Boisseau : unité de mesure valant sensiblement 12,5 litres.
8)    Aigurande : paroisse voisine plus importante, lieu d’un marché au XXVIII° siècle.
 
 


19/06/2011

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